2024-01-10 Entretien avec Lola Lafon – L’ineffaçable

Introduction

Lola Lafon a écrit un superbe livre « Quand tu écouteras cette chanson ». Après avoir passé une nuit au Musée Anne Frank, l’écrivaine a écrit ce texte bouleversant de vérité, aussi intime qu’universel.

Propos recueillis par Brigitte Stora

Plurielles : Tout le monde connaît Le journal d’Anne Frank, un des livres les plus vendus au monde. Ton livre se propose pourtant de dévoiler une autrice invisibilisée, une Juive gommée, le drame et l’abandon dissimulés derrière un éternel sourire. La véritable Anne Frank, son histoire et sa fin tragique auraient-elles été occultées derrière sa célébrité ?

Lola Lafon : Anne Frank est devenue un symbole, un résumé de tous les malheurs de la Shoah. On étudie son journal dans les collèges et les lycées et c’est sans doute une bonne chose. Tout le monde croit la connaître et moi aussi je le croyais jusqu’à ce que je découvre une autre Anne Frank, que son mythe avait fini par éclipser. Que s’était-il passé pour qu’une version « hollywoodienne » de l’histoire recouvre totalement l’autre ? J’ai découvert comment, très vite, on avait décidé de faire d’Anne Frank une icône et j’ai été stupéfaite par les différentes adaptations de son journal.

En 1955, Broadway décide d’en faire une pièce de théâtre ; on lisse son texte, on gomme ce qui pourrait fâcher comme ses propres colères, la haine qu’elle exprime vis-à-vis du nazisme. On supprime aussi les passages sur Hanoukka et toutes les références à sa judéité. Lorsque Anne Frank se demande « pourquoi le peuple juif souffre tellement », on a cru bon d’ajouter cette phrase incroyable : « mais tous les peuples ont toujours souffert » !

Toutes ces manipulations m’ont mise en colère car j’ai eu l’impression d’assister à la fabrication d’un mythe, à une fabrication d’images. D’ailleurs son père, Otto Frank, n’a jamais été voir la pièce de Broadway.

Le film sorti en 1959 m’a encore plus sidérée. Le réalisateur, George Stevens, a dû tourner une nouvelle fin suite à une projection test, car les spectateurs trouvaient le film trop « triste ». On a alors choisi un happy end où Anne réaffirme sa « foi » dans l’humanité, son malheur se transformant en un message d’espoir ! Et c’est ce qui demeure, le visage souriant et confiant d’une jeune fille. Un critique du New York Times avait même félicité le film car on en sortait « sans haine vis-à-vis du nazisme» !

Il est vrai que dans les années 50, en pleine guerre froide, il ne fallait pas compromettre la réconciliation avec l’Allemagne et, sur le fond, personne n’avait vraiment envie d’entendre cette histoire.

La version d’Hollywood s’est imposée, il fallait que ce récit ne soit, selon leurs propres mots, « ni trop triste, ni trop juif ».

Dans une des éditions du livre, Eleanor Roosevelt, sans doute avec bienveillance, écrivit qu’Anne Frank « œuvrait pour la paix ». Mais Anne Frank n’œuvrait pas du tout pour la paix : elle se cachait pour ne pas mourir.

« Son Journal est l’œuvre d’une jeune fille victime d’un génocide, perpétré dans l’indifférence absolue de tous ceux qui savaient. N’utilisez pas le mot espoir, s’il vous plaît ». Ce sont les mots de Laureen Nussbaum que j’ai eu la chance de rencontrer pour ce livre.

Plurielles : Laureen Nussbaum évoque aussi une autre invisibilisation : Anne Frank n’écrivait pas un « journal intime » mais une œuvre littéraire.

Lola Lafon : Laureen Nussbaum était une amie d’enfance de Margot, la sœur d’Anne. Elle est une des dernières personnes à l’avoir connue. Elle a tout de suite insisté sur le talent d’écrivaine d’Anne Frank et m’en a parlé comme d’une autrice invisibilisée dans son travail. Elle se souvient qu’Anne avait entendu, sur une radio clandestine, un ministre demandant aux populations des Pays-Bas de conserver leurs écrits comme preuves. Dès lors, à partir de 44, son journal se transforme en livre car elle est persuadée qu’elle sera publiée après-guerre.

Ce fut pour moi un choc d’apprendre qu’elle avait plusieurs fois réécrit son texte qu’elle avait elle-même intitulé Le récit de l’annexe. J’ai mesuré à quel point elle avait opéré des choix littéraires, coupant certains passages, réécrivant des chapitres, mêlant des réflexions personnelles à des considérations politiques. Il s’agit bel et bien d’une œuvre littéraire qu’elle conçoit comme telle. Or la postérité n’a voulu retenir que le « journal intime » d’une jeune fille. Anne Frank voulait devenir écrivaine, pas un mythe. Elle avait une claire conscience de son talent ainsi que le désir d’y parvenir, tout cela il fallait le lui rendre et je me devais d’abord de raconter cette histoire. Son texte s’adresse à un avenir, à ses futurs lecteurs. En le relisant, j’ai réalisé qu’il était aussi venu me chercher.

Plurielles : Vous écrivez : « Comme elle est aimée cette jeune fille juive Anne Frank, on l’aime d’autant plus qu’on ne connaît pas la fin. » Pourtant on sait qu’elle est juive et sa fin, tout le monde la connaît. Elle-même n’en ignorait rien.

Lola Lafon : Il y a sans doute une différence entre savoir et regarder en face, c’est-à-dire affronter cette réalité. Anne Frank n’avait pas d’autre choix que de comprendre ce qui se passait, elle regardait au-dehors, cachée derrière les rideaux de la fenêtre. Elle décrit les rafles : « Personne n’est épargné, vieillards, enfants, bébés, femmes enceintes, malades, tout, tout est entraîné dans ce voyage vers la mort.… Et tout cela, pour la seule raison qu’ils sont juifs ». Et elle écoutait la radio. À la date du vendredi 9 octobre 1942, elle écrit : « Nous n’ignorons pas que ces pauvres gens seront massacrés. La radio anglaise parle de chambre à gaz. J’en suis malade ».

Oui c’est vrai, on connaît l’histoire d’Anne Frank, sa fin tragique, et bien sûr d’une certaine manière, on l’étudie aussi parce qu’on connaît la fin. Mais peu ont en mémoire l’image d’une jeune fille décharnée, ayant perdu tous ses cheveux, morte du typhus, de faim et de froid dans la plus complète solitude. Il a fallu taire cette fin, de même, et c’est sans doute lié, qu’il a fallu estomper, gommer sa judéité pour en faire le symbole de l’adolescence en lutte contre « l’adversité ». Vouloir ériger une jeune fille juive en symbole universel de paix en dit beaucoup sur l’impossibilité de reconnaître la spécificité de la Shoah.

Il me semble que l’on doit s’interroger sur cette nécessité de gommer les Juifs lorsqu’on parle d’universel.

Plurielles : C’est peut-être une très vieille histoire …

Lola Lafon : Oui sans doute, une histoire qui se répète… Dans une certaine représentation du monde, juif et universel s’opposent, comme s’il fallait nécessairement s’abolir pour toucher les autres. Je crois aujourd’hui que cette vision de l’universel est un piège. En réalité, on est plus fort pour parler du malheur du monde quand on prend avec soi sa propre histoire. Et ce livre m’a aussi permis d’en parler. Car il est vrai que pendant longtemps, j’avais du mal à l’assumer, il y avait là quelque chose de trop lourd.

Plurielles : « Trop juif et trop triste » ?

Dans une de vos chansons, Une vie de voleuse, vous exigez « une vie un peu plus légère », peut-être affranchie de la douleur du passé ? Dans votre livre, vous écrivez : « Le ravage, dans ma famille, s’est transmis comme ailleurs la couleur des yeux. » Vous écrivez aussi : « ma blondeur était un passeport vers la normalité ».

Lola Lafon : Oui, peut-être que moi aussi je trouvais cette fin « trop juive et trop triste », (on dirait vraiment une blague juive…). Cette histoire trop douloureuse, je ne voulais pas en faire partie ou plus exactement, je n’y parvenais pas.

Dans mon adolescence, il ne m’était pas facile d’être juive, j’ai longtemps repoussé cette sorte d’assignation. J’ai préféré détourner les yeux, refusant toute appartenance que je n’aurais pas choisie. Je ne voulais susciter ni pitié ni haine, être un peu comme les filles que je fréquentais et qui portaient une croix. Plus tard, j’ai revendiqué une existence en dehors de nos origines, comme une déclaration d’indépendance, la liberté de n’appartenir à rien.

Pour moi pendant longtemps, être juif c’était être du côté de la mort et moi je voulais aller du côté de la vie. Il y eut pourtant une première brèche lorsque, vers 18 ans, j’ai séjourné dans ma famille nord-américaine. Ils avaient émigré avant la Shoah et leur judaïsme était joyeux; on y chantait pendant shabbat. J’ai adoré cette possibilité d’être juif sans la honte ni le malheur, d’ailleurs, en revenant en France, j’ai porté quelque temps une Magen David.

Mais il m’a fallu encore du temps pour trouver la force de me pencher sur l’abîme sans y être engloutie.

Plurielles : Vous avez milité à l’extrême gauche comme de nombreux Juifs, mais aussi comme vos grands-parents et vos parents communistes. Cet engagement a souvent coïncidé avec un désir d’échapper à la malédiction juive, en appartenant enfin aux autres, en étant « invisible », à l’inverse de la distinction si pesante, si haïe.

Mais l’antisémitisme se charge de débusquer les Juifs, de rendre « visibles » ceux qui ne le souhaitaient plus, les renvoyant à une irrémédiable solitude

Lola Lafon : Anne Frank écrit : « Qui a fait de nous, les Juifs, cette exception parmi les peuples ? »

J’ai longtemps milité dans les milieux libertaires où j’ai mené bien des combats, à l’exception de ceux qui me touchaient de trop près et me rendaient vulnérable. À l’inverse de ce « gommage » volontaire, j’ai d’abord commencé à affirmer une identité féministe. La force collective des femmes à travers le mouvement Me too m’a aussi permis de l’assumer. Je crois que le courage est contagieux car, dans le même temps, j’ai fait des rencontres décisives avec des groupes et des militants juifs de gauche comme les JJR, les Juifves VNR, le collectif Golema, le RAAR . Ces militants juifs refusaient de continuer à s’invisibiliser et ont entrepris de porter une parole forte sur l’antisémitisme dans laquelle j’ai pu enfin me reconnaître. C’est sans doute une triste réalité qu’il faut aussi regarder en face ; aucune prise de conscience ne peut se faire sans la parole des principaux intéressés et ce ne sont pas les Juifs invisibles et silencieux qui obligeront les milieux de gauche et antiracistes à se regarder en face. Depuis quelques temps, et bien que timidement, cette question commence un petit peu à émerger. Il est vrai que cette parole est arrivée après un long silence et des expériences amères et partagées qui, là aussi, ne relevaient pas de l’intime mais bien d’une expérience politique et collective.

Pour ma part je n’ai vraiment été confrontée à l’antisémitisme qu’une seule fois, mais ce fut violent. Un jour, un militant a tenu devant moi un discours négationniste, tranquillement. Ma seule réponse fut de lui dire que j’étais juive. Les autres étaient gênés mais sans plus, d’ailleurs c’est moi qui suis partie, pas lui. Et c’est là un constat commun. Pas de réactions, alors même que nous étions dans des milieux qui réagissaient à tout. Nous écrivions des textes sur tous les problèmes du monde mais quand il y a eu l’assassinat des enfants juifs de Toulouse, nous n’avons rien écrit. J’avais déjà manifesté seule pour Ilan Halimi en ressentant déjà cette solitude. Mais là, ce fut renversant. Je suis allée seule au rassemblement, puis il y eut l’Hyper Cacher…

Ce qui m’a rattrapée, c’est encore une fois, cette prise de conscience d’être au carrefour de ce qui se passe dans le monde et de ce que nous portons en nous. Comme une impossibilité de « regarder ailleurs ».

Plurielles : Avec l’icônisation d’Anne Frank, nous aurions passé notre temps à détourner le regard ? Pourtant depuis le début, le journal d’Anne Frank est la cible des négationnistes …

Lola Lafon : Les négationnistes n’ont jamais désarmé. Encore récemment, le 10 février dernier, on a projeté un message laser négationniste sur la façade du musée : « Anne Frank a inventé le stylo à bille » . Depuis des décennies, ils mettent en doute l’authenticité du journal, parlent d’une invention de son père etc. Anne Frank continue de les obséder. Je pense aussi, (même si c’est très différent), à Qui a trahi Anne Frank ?, le livre qui expliquait qu’un notaire juif Arnold van den Bergh aurait révélé leur cachette. Après vérifications la maison d’édition s’est excusée, le livre a été retiré de la vente, mais il avait fait l’effet d’une bombe, aux Pays-Bas comme ailleurs !

Plurielles : Si les Juifs sont eux-mêmes coupables, l’ardoise est effacée ?

Lola Lafon : Oui, comme s’il s’agissait toujours d’envoyer des signes aux autres négationnistes, des messages qui visent à gommer, amoindrir ou relativiser. Je pense aussi aux manifestations contre le Pass sanitaire à Amsterdam, à l’été 2021, où l’on a brandi son portrait, en scandant : « Liberté, liberté. » Anne Frank est une icône que l’on se plaît à piétiner.

Plurielles : votre grand-mère Ida vous avait offert une médaille à l’effigie d’Anne Frank, en vous disant : « souviens-toi ». Et c’est dans la maison d’Anne Frank, ce lieu dépouillé, que cette promesse a fait écho. Vous écrivez : « Qu’on en soit témoin, du vide, sans pouvoir s’y soustraire ; qu’on s’y confronte … Dans l’Annexe, il n’y a rien, et ce rien, je l’ai vu. ». Les absents, finalement, sont toujours là ?

Lola Lafon : J’ai passé la nuit du 18 août 2021au Musée Anne Frank, dans l’Annexe. Or l’annexe est un lieu vide et je crois que ce vide m’a convoquée. J’ai d’abord marché en comptant mes pas, dans cet espace exigu de 42 mètres carrés que partageaient huit Juifs clandestins, contraints au silence. J’ai tenté d’imaginer ces vies cachées pendant vingt-cinq mois, c’est-à-dire sept cent soixante jours et des milliers de minutes. Lors de cette nuit insomniaque, j’ai réalisé que j’étais face à ce que, longtemps, j’avais souhaité éviter.

Le silence et l’absence laissent des traces, je m’y suis retrouvée confrontée. Irrémédiablement. Comme à une question que nous devons recevoir sans jamais chercher à l’abolir, ni à lui donner une réponse définitive.

Car il est vrai qu’il n’y aura jamais assez de vivants pour répondre aux morts. Les absents n’ont pas disparu, ils sont là et leur absence est une question qui doit continuer à nous chercher.

Plurielles : Vous écrivez : « Ne pas oublier et ne pas rester sidéré, comment marcher sur des traces sans les effacer ? »

Lola Lafon : Tous les survivants et leurs descendants héritent d’une sorte de devoir, ils ne peuvent pas se contenter de seulement exister, ils doivent vivre plus fort, pour les disparus. Je n’ose pas dire à leur place. La Shoah et l’antisémitisme sont un abîme, il faut pouvoir s’y pencher sans se laisser engloutir pour pouvoir continuer à écrire dessus.

Plurielles : Avec pudeur, vous évoquez Pierre Goldman, le cousin de votre mère.

Lola Lafon : Pierre a voulu désespérément rejouer la résistance des siens. Il était l’héritier de ce ravage, de cette colère inassouvie, il a milité partout, fait la guérilla en Amérique latine, s’est parfois perdu. C’est peut-être cela se pencher sur l’abîme et s’y noyer.

Dans ma famille, j’ai pu mesurer l’impasse que cela signifie de vouloir revivre ce qu’avaient fait nos parents, nos grands-parents, comme pour réparer, venger, au risque de l’effacer, ce qui avait eu lieu. Mais en fait, c’est impossible. J’appartiens à la troisième génération après la Shoah, il nous faut penser à ce que nous faisons de cet héritage. Pour ma part, il m’a semblé que je devais rendre Anne Frank à elle-même, sans tout à fait marcher dans ses pas. C’est sans doute pour cela que je ne suis pas entrée dans sa chambre, j’ai voulu lui restituer sa vérité, peut-être un peu de sa vie.

Plurielles : Vous écrivez : « Regarder en face ce qui ne sera jamais comblé ». René Char écrivait que la lucidité était « la blessure la plus rapprochée du soleil ». Peut-on comprendre le succès, mais aussi l’émotion que votre livre provoque, à l’aune de ce dévoilement ? Comme un consentement à la lumière, voire à la brûlure ?

Lola Lafon : Le succès de mon livre m’étonne moi-même, je me suis rendue dans des dizaines de villes en France. Il n’y a pas de profil type de lecteur et c’est précisément ce qui me touche. Les rencontres sont chaque fois des grands moments de partage. Les gens viennent de partout et ce qui me bouleverse par-dessus tout, c’est le brassage des générations. Lors des séances de dédicaces, je vois des grands-mères avec leurs petits-fils, mais aussi des jeunes qui ont emmené leurs parents, comme si ce livre, bien au-delà de la communauté juive, s’inscrivait dans une transmission. Il n’y a pas d’équivalent à la Shoah, mais la question de l’exil, des silences à la place de la transmission, de la douleur à affronter son histoire sont, je crois, communs à beaucoup d’entre nous. C’est ce que me disent parfois des descendants de travailleurs algériens, de réfugiés italiens, etc., en ajoutant : « Je n’ai pas du tout votre histoire », tout en s’identifiant à ce récit. Il y a peut-être une vérité en partage dans le fait de rendre hommage aux siens et aux autres.

Plurielles : Il y a cette idée, aujourd’hui fort répandue, qu’on en aurait trop fait sur la Shoah, qu’il est temps de clore le chapitre. L’accueil de votre livre en constitue pourtant un cinglant démenti.

Lola Lafon : Quand on écrit un livre, on se demande toujours si les gens vont nous suivre. Lorsque j’ai choisi le musée Anne Frank, j’ai aussitôt pensé à cette petite musique installée : « encore un livre sur la Shoah ? ». Et puis j’ai réalisé qu’on n’en avait vraiment pas fini avec cette histoire. Que peut-être, pour beaucoup d’entre nous, on n’avait pas même commencé. Il m’a semblé que la statufication d’Anne Frank avait aussi eu pour fonction de se « débarrasser » de cette histoire. Comme un solde de tout compte. Anne Frank, tout le monde l’a lue, beaucoup l’ont oubliée, elle apparaît un peu comme la figure expiatoire d’un crime que tout le monde voudrait ignorer. Je repense à cette phrase si juste dans le Jan Karski de Yannick Haenel : « L’extermination des Juifs d’Europe n’est pas un crime contre l’humanité, c’est un crime commis par l’humanité ». Non, le chapitre ne sera jamais clos, on ne peut pas et on ne doit pas le clore. Il faut accepter de recueillir ces traces, ces absences, d’écouter ces silences. Un peu comme dans le beau film du réalisateur cambodgien Rithy Panh, L’image manquante. Cette image, qu’il ne trouve pas, doit continuer à nous manquer.